Samedi 9 janvier. Au cœur de l'hiver, des trombes d'eau s'abattent sur la Basse-Bretagne. Pour rattraper la ronde reportée à cause des attentats de Paris, nous devons nous déplacer aujourd'hui à Brest et demain à Caen – dix heures de route dans le week-end. Sans même une présence féminine pour détendre l'atmosphère.

A Brest, nos hôtes ont eu du mal à trouver une salle libre. Malgré l'accueil est cordial, l'atmosphère est glaciale. Car ils ont dû se rabattre sur la Maison des syndicats : une salle immense, ouverte aux courants d'air, à l'architecture stalinienne. D'habitude, l'énergie dégagée par quelques centaines de syndicalistes échauffés par les packs de bière, les chants de lutte et l'espoir du grand soir suffit sans doute à réchauffer l'ambiance. Sinon, on installera des braseros et des stands galettes-saucisse à l'entrée. Mais là, les cafetières qui s'activent tout au fond ne suffiront pas à dégeler deux douzaines de joueurs d'échecs immobiles et emmitouflés dans leurs doudounes.

Brest 2 a échappé de peu à la défaite l'année dernière, ils se sont donc méfiés et ont opérés quelques interversions stratégiques. Pour autant, après deux heures de jeu, malgré la différence Elo qui les avantage sur tous les échiquiers sauf les deux premiers, ça ne se présente pas trop mal : nous sommes plutôt mieux sur les quatre premiers échiquiers, plutôt moins bien sur les quatre derniers. Les temps de pendule s'équilibrent. Gérard (#8) et Patrick (#5) sont les premiers à lâcher du matériel, tandis que Bernard (#6) s'enferre en essayant de se dégager ; Damien (#7) n'est pas parvenu à tirer parti de son attaque, et doit rendre l'initiative, mais il manquera quand même, tout au bout de la finale, une occasion d'annuler. Malheureusement, faute peut-être de sentir encore leurs extrémités frigorifiées, les figures de proue se dérèglent à leur tour. Brendan (#1), en position favorable contre Erwan Bleuzen, donne une Tour ; Hervé (#4), en difficulté au temps, finit lui aussi par lâcher du matériel ; Laurent (#2) et Xavier (#3) parviennent à gagner une qualité, mais tandis que Laurent convertit le gain, Xavier se fait piéger juste avant le contrôle de temps, trouve un plan de nulle mais finit par le lâcher au profit de chimères. Le score final (7-1) est logique, mais sévère au vu des parties.

Pendant ce temps, l'équipe B reçoit une équipe du cercle Paul Bert. Raphaël (#4) perd en premier suite à une attaque un peu rapide. Pour sa première sortie en compétition, Ewa (#3) tient bon contre un adversaire plus fort, mais joue un peu vite et finit par commettre une boulette. Baptiste (#5) réalise une bonne partie mais s'incline au final contre le jeune Natello. Contre Pierre Lezot, Yann (#1) arrache un pion au 13ème coup sur une embrouille tactique émaillée d'un sacrifice de Dame, et l'emporte peu après. Louis (#2) finit par proposer nulle dans une partie tendue. Score final 3-1.

 

Dimanche 10 janvier. Le temps s'est calmé, et c'est sous le soleil (mais avec les gants) que nous attaquons nos casse-croûte sur l'esplanade déserte du stade d'Ornano. Cosy, chauffée, déjà installée, équipée d'un bar, la salle de jeu du club de Caen Alekhine nous accueille dans un contraste bienvenu. Contre une équipe qui évoluait l'année passée en Nationale 2, nous ne nourrissons guère d'ambitions. François (#5), un peu rouillé après une longue interruption, se complique la tâche par un plan douteux en sortie d'ouverture. Son adversaire réagit précisément et transforme bientôt l'avantage positionnel en opportunité tactique. Contre Denis Laplanche, président du club et habitué des opens, Laurent (#2) se fait lui aussi mystifier dès la sortie de l'ouverture. Patrick (#6) subit un sacrifice sur le roque, les Fous s'engouffrent imprudemment dans sa position mais il manque la tactique qui lui aurait permis d'en enfermer un. Après avoir manqué de gagner un pion dans l'ouverture et échangé les Dames, Hervé (#4) subit une pression positionnelle qui immobilise ses pièces ; son Roi part à l'attaque, mais privé du soutien de ses troupes paralysées, finit par se faire mater au milieu de l'échiquier. Damien (#8) subit quant à lui un étau de Maroczy dont il ne parvient pas à se dépêtrer ; il tient longtemps, mais sa défense désordonnée n'est plus en mesure d'arrêter l'assaut des pions liés et des pièces qui les soutiennent.

5-0, on ne pouvait craindre plus mauvais départ ; dommage car les échiquiers restants tiennent plutôt bien. Bernard (#7) n'a pas réussi à faire fructifier l'avantage acquis dans l'ouverture, et au moment où la finale est totalement nulle son adversaire commet une erreur tactique improbable qui lui donne le gain... qu'il laisse échapper par précipitation. Brendan (#1) a un bon pion de plus et simplifie dans une finale ouverte mais ne parvient pas non plus à convertir. Enfin Xavier (#3), qui en bon capitaine reste une fois de plus le dernier sur le navire, a gagné une pièce contre deux pions au 18ème coup grâce à un piège tactique, et s'est bien appliqué pour tirer avantage du très mauvais Fou adverse ; mais son adversaire, bien que complètement perdant, va poursuivre le combat au-delà de la limite raisonnable, sans doute pour le plaisir de nous gâcher notre week-end jusqu'au bout. Score final 5-1, une fois de plus logique mais qui en démoraliserait de moins aguerris.

D'autant que l'équipe B va également échouer : contre Liffré C, Yann (#1) et Louis (#2) réalisent un joli doublé contre les époux Ruhlmann, mais Raphaël (#3), Gérard (#4) dans une finale pourtant égale, et Baptiste (#5) s'inclinent, score final 3-2.

Tempêtes, froid, déplacements interminables, occasions manquées et boulettes en série : un week-end à vite oublier !