Pour sa première qualification au 2ème tour de la Coupe de France, Betton recevait un adversaire de poids : l'équipe de Rennes Longs Prés, pensionnaire de Nationale 2, qui avait atteint il y a deux ans les quarts de finale de cette prestigieuse compétition nationale ! C'est du reste tout l'intérêt de la coupe de France que de donner à de modestes amateurs une chance de se confronter à des joueurs beaucoup plus forts, qu'ils ne croiseraient pas en temps normal.

Nos voisins traitent cette affaire avec le plus grand sérieux puisqu'ils alignent leurs trois plus forts joueurs pour l'occasion, tous classés au-dessus de 2200 Elo !

Seul Romain Le Borgne, au 4ème échiquier, est d'un niveau comparable au nôtre. Sa malchance est de tomber contre Yvon, qui fait des prodiges en équipe depuis le début de l'année. Remonté comme une pendule, Yvon lui sort de son sac à malices un gambit où il sacrifie pas moins de trois pions !!! Désorienté, Romain se défend par des coups logiques et sensés, puisqu'il suit jusqu'au 14ème coup la partie d'un des plus grands joueurs américains du milieu du 20ème siècle, Reuben Fine. Sauf que son adversaire dans cette partie... était un certain Bobby Fischer, dont Yvon réinvente sans le savoir une des fameuses 60 meilleures parties ! Romain améliore le jeu de Fine au 14ème coup, et Yvon trouve le seul coup gagnant, suivi d'un sacrifice de Tour également joué par Fischer, pour forcer le gain ! Yvon « Fischer » Martin réalise ainsi sa deuxième miniature d'affilée et sa cinquième victoire consécutive en équipe. On l'a mis tout de suite dans un seau de glace : si ses chevilles parviennent à désenfler d'ici le prochain match, son adversaire a du souci à se faire !

Au troisième échiquier avec les Noirs, Solenne ne veut pas être de reste et offre également un pion au maître Fide Damien Le Goff, qui compte à peu près autant de points d'écart avec elle qu'avec Magnus Carlsen ! Sous pression dans l'ouverture, Solenne parvient à échanger des pièces mineures, terminer son développement et même à placer favorablement ses pièces restantes. Damien a conservé son pion de plus, mais sa finale Dame-Tour ne paraît pas du tout simple à gagner. Malheureusement, Solenne a perdu beaucoup trop de temps à la pendule pour tenir les 20 coups qui lui restent avant le contrôle de temps.

Au deuxième échiquier, Laurent est opposé à Mickael Alanic qui gambite lui aussi un pion dans l'ouverture, sans grand succès. Alors qu'il paraît mieux, Laurent s'inquiète soudain des conséquences d'une détérioration possible de sa structure de pions et les spectateurs médusés le voient rentrer son Cavalier, puis son Fou sans même avoir roqué ! C'est le début d'une mauvaise série : pénalisé par son retard de développement, Laurent est comme pris dans les sables mouvants, et à chaque nouveau coup son adversaire accroît son emprise sur une position qui devient désespérée.

Au premier échiquier, Xavier affronte avec les Blancs Xavier Alanic (le frère aîné du précédent), réputé le joueur le plus rapide de Bretagne. C'est pourtant notre capitaine bettonais qui joue a tempo ses 19 premiers coups, que lui arrive-t-il ? C'est juste qu'il est tombé pile dans une variante récemment préparée, et que son adversaire trouve d'instinct tous les meilleurs coups - lui non plus ne réfléchit guère ! La situation résultante est égale, avec un pion isolé avancé pour les Noirs, qui va constituer l'enjeu des combats. Xavier se défend méthodiquement et parvient à échanger pièce après pièce, et quatre coups avant le contrôle de temps, il a l'opportunité d'échanger les dernières Tours pour entrer dans une finale Dame-Cavalier vraisemblablement nulle. Au lieu de quoi, content d'avoir réglé ses problèmes, il envoie sa Tour sans raison à la chasse aux pions... et permet à son adversaire de gagner aussitôt une pièce et la partie.

Victoire logique des Longs Prés avec un score final tout à fait honorable de 3-1, une nouvelle miniature époustouflante au crédit d'Yvon et comme toujours quelques petits regrets. Objectif l'année prochaine : passer un tour de plus !